Problématique
générale
La mise en oeuvre du dispositif
législatif, réglementaire et conventionnel de réduction du temps de
travail initié par la loi du 13 juin 1998 devrait conduire en 2002 l’ensemble
des acteurs du bâtiment à une durée légale du travail de 35
heures.
D’ores et déjà deux accords
conventionnels ont été signés dans le secteur, l’un concernant l’artisanat
du bâtiment, le 10 septembre 1998 par la CAPEB, la CFDT, la CFTC et
FO, et auquel par la suite a adhéré la CGT, et l’autre
"dans le BTP de plus de 10 salariés", signé à
la fois par la FFB, la FNTP et la FNEE, en ce qui concerne les
employeurs, et par la CFTC, FO et la CGC pour ce qui est des syndicats
de salariés.
Les deux accords ont fait l’objet
d’une extension, le premier, le 31 janvier 1998, le second, le 26
février 1999, assortie pour celui-ci de plusieurs exclusions et de
réserves.
Des questions très importantes
restent aujourd’hui en suspend, et notamment le choix que feront les
entreprises de bâtiment employant 11 à 20 salariés, entre les
accords qui leurs sont tous deux ouverts, la rémunération des heures
supplémentaires, la définition du temps de travail effectif...
Mais de fait, l’ensemble du
secteur du BTP s’est aujourd’hui, et rapidement, doté de la base
conventionnelle lui permettant de prendre en compte ses spécificités
vis-à-vis du temps de travail. En se référant
aux travaux d’économie générale réalisés en vue d’analyser
les incidences de la réduction du temps de travail depuis un siècle,
il est à peu près établi que la réduction du temps de travail s’accompagnera
d’un double mouvement de recrutement et d’accroissement des
exigences de productivité, l’ampleur et le poids respectifs des
deux phénomènes étant globalement estimés par les économistes à
"50/50", c’est-à-dire d’ampleur à peu
près équivalente.
La situation des entreprises de
bâtiment et tout particulièrement compte tenu de son objet, celle de
l’entreprise générale vis-à-vis de ces incidences, est à la fois
nouvelle et inscrite dans la durée.
De manière structurelle, l’évolution
des marchés, depuis plus de vingt ans, a eu des répercussions
importantes sur les conditions de production, au travers notamment de
la recherche permanente d’économies. Celles-ci se sont
principalement centrées sur des préoccupations de réactivité
concurrentielle et à très court terme : diminution des délais de
construction, rationalisation de l’immobilisation des moyens de
levage et de manutention de l’entreprise générale, au plus près
de la fin du gros oeuvre, recherche de la flexibilité en terme d’encadrement.
Pour l’entreprise générale,
elles ont eu pour corollaire une gestion souvent à très court terme,
des conséquences de la réduction des effectifs, couplée avec les
conséquences résultant des options retenues entre activité propre
et travaux sous-traités. Dans un contexte
économique et de marché qui s’annonce enfin meilleur, le passage
aux 35 heures nécessitera aussi de produire dans des délais de
travail raccourcis, dans la mesure où les gains nécessités par la
réduction du temps de travail ne pourront être complètement
compensés par des recrutements, mais, cette fois, suivant des
modalités, dont on peut cependant faire raisonnablement l’hypothèse
qu’elles seront significativement différentes de celles de la
période précédente.
En effet :
-
Alors que le contexte de crise
économique, en pesant sur le niveau de prix et les conditions de
production, a aussi pesé, par voie de conséquence, sur les
niveaux de qualité réalisés, la relance de la demande dans un
environnement socio-économique de plus en plus sensible à la
qualité des ouvrages, peut avoir un "effet
retour" positif sur la qualité.
-
De plus, les lois et les accords
ARTT réduisent, dans leurs principes, la possibilité de faire
beaucoup d’heures supplémentaires sur le chantier, ce qui
limite les flexibilités en termes d’intensification du travail
de production au profit de la recherche de gains de productivité
plus "structurels". Leur réalisation
nécessite de nouvelles compétences... et de nouveaux moyens, en
termes notamment de gestion de la production, de qualité et d’économie
des "transactions" entre les acteurs de la
filière.
-
L’ ingénierie de chantier qui
va en résulter repose en outre pour une part importante sur des
professionnels qui, compte tenu des évolutions des effectifs de
ces dernières années, ont rejoint récemment les entreprises ou
seront amenés à les intégrer prochainement. Sa performance est
donc à la fois dépendante d’un renouvellement des méthodes,
des hommes et des compétences.
On peut raisonnablement faire l’hypothèse
que la fonction du conducteur de travaux est au centre des évolutions
précédentes, compte tenu notamment de la position que celui-ci
occupe, à l’interface des études amont et de la réalisation,
ainsi que de son rôle dans la préparation puis dans la réalisation
des chantiers.
Cette fonction a sans aucun doute
déjà considérablement évolué au cours de la période
précédente, même si, comme le pointe la Direction Recherche et
Développement de GTM, les entreprises ne connaissent pas toujours,
dans le détail, la façon dont cette évolution s’est effectuée,
ainsi que ses contenus précis. Pour expliquer cette méconnaissance,
sont avancées, en premier lieu une coupure entre les sièges et les
chantiers, puis la réduction de la taille et du volume des chantiers
qui a accentué l’éclatement de la fonction de conducteur de
travaux sur plusieurs chantiers successivement ou simultanément.